Petite pause dans le quotidien du déconfinement annoncé. Assez d’inquiétudes et de cauchemars : tables-ilôts, client bâillonné sous plastique, broderie ou cellophane, restaurateur en Capitaine Nemo souhaitant la bienvenue à bord du Nautilus, peur de l’Alien planqué dans la tuyauterie, serveur suant sous la visière… quel plaisir de retourner cet été au restaurant ! Ce menu sanitaire ne donne pas envie mais attendons, la réalité vécue en juin ne sera peut-être pas celle écrite en mai…
Alors, pour s’évader, voici quelques images empruntées à Mathieu Allinei, chef et patron du Bistrot du Port à Golfe-Juan et fin cuisinier du poisson (1).
Cet autodidacte qui réalise, à ses moments jamais perdus, caramel salé à l’encre de seiche, nuoc-mâm d’anchois, sardines, poutine et rouget ou «foie gras» de baudroie, n’est pas un professionnel de la photo et ne se trompe pas de métier. Le sien est d’offrir le meilleur à ses clients : pureté à l’assiette, vérité du produit, plaisir du goût juste, explorations, découvertes… il est un artisan de la mer.
Il y a un côté japonisant dans ses compositions. Pour la symbolique et le sens caché. Un air des abysses dans ses portraits marins, détachés de tout environnement. Les fuites et les stratagèmes, aussi, de ces apparitions surgies de mondes lointains.
Mathieu Allinei s’approche du mystère sans chercher à l’élucider, il a l’art de la nuance et poétise le choc des couleurs dans cette esquisse de collection, semblable à la palette du peintre.
Mers et océans lui livrent quelques secrets des profondeurs et créatures extramarines. Le génie de la dissimulation, des poissons pour contes de fée, amuseurs ou stylistes, écailles dorées et yeux de verre, gueules monstrueuses à «la beauté cachée des laids» (Gainsbourg)… Des êtres d’avant, pendant et après tout cataclysme. Inspiré aux fourneaux et à l’image, il en traduit saveurs, émotions et vibrations. Il faudra revenir à la table de ce « fou de mer » !
(1) En attendant des eaux moins agitées, Mathieu Allinei cuisine des plats à emporter, à la carte ou sous forme de menus de midi (entrée, plat, dessert, 26 €). Ainsi celui du 8 mai, bonite façon vitello tonato, maigre rôti au citron noir, asperges vertes et polenta croustillante, tarte aux fraises pochées au rosé de Provence et crème mousseline à la sauge. Dès lundi 11 mai, le soir seulement, il proposera également de cuisiner à domicile pour 4 à 10 personnes, des menus en 5 à 7 «paliers» (95, 118 et 132 €). Contact : 06 74 08 41 88 et www.bistrotduport.com.