La bistronomie, on n’a que ce mot à la bouche. Bistromanie ! Ce phénomène doit beaucoup à Yves Camdeborde, créateur de La Régalade à Paris, l’été 1992,etcomme dans la «Nouvelle Cuisine» des années 70, inventée par Gault et Millau, on y trouve autant de pépites que de copies. Mais ce bistrot caché dans les coulisses de la Croisette, à deux pas du marché Gambetta, ne doit rien à personne et régale depuis douze ans la clientèle cannoise.
Après avoir fait l’ouverture du Café Llorca à Vallauris, Carole Peretti reprenait alors le restaurant des volleyeuses du RC Cannes et apportait d’autres rêves de comptoir. Aujourd’hui, Les Canailles n’a rien perdu de son charme retro. La terrasse sur la rue garde son calme, la première salle, avec bar et fauteuils de cuir, s’anime à l’heure apéritive et la seconde, mur de pierres, tableau-miroir et fresque évoquant, pour l’amateur de BD, la série Torpedo de Jordi Bernet et Sanchez Abuli, est du pur cocooning.
Fin janvier, j’ai retrouvé avec plaisir ce décor de petit théâtre. Il a toujours bon pied, bon œil et raconte sans vantardise son histoire de bistrot gourmand. Avec Michel Cortesi, aux côtés de Carole à l’ouverture du Café Llorca, la cuisine est entre de bonnes mains. Il connait ses classiques, œuf cocotte, andouillette AAAAA, hachis parmentier, profiteroles, baba, crème brulée… L’ardoise passe de table en table, annonce faite aux bons vivants et de la salade de poulpe jusqu’à la sphère au chocolat, l’assiette ne minaude pas. C’est son droit et même son devoir dans ce bistro peu bobo mais pas popu non plus.
Le ceviche de daurade au gingembre, coriandre et citron vert est une entrée légère, aux saveurs et couleurs d’aujourd’hui. Le croustillant d’escargots au curry, hébergé à vie, fait la joie des habitués comme des festivaliers en mai, autant «signature» que les raviolis à la joue de bœuf façon daube ou l’onglet de veau, sauce échalotes. La carte des vins revient en enfance, écrite dans un cahier d’écolier à spirales. De bonnes notes en Provence – Clos de l’Ours, Gavaisson, Figuières… – et quelques pépites à prix raisonnables comme le Clos des Fées d’Hervé Bizeul en Côtes du Roussillon (35 €).
Carole et Fanny à l’accueil adorable, apportent sans tarder mais sans courir les bonnes nouvelles préparées en cuisine. Ainsi vont Les Canailles, à la convivialité des quatre saisons. On se moque bien de savoir à quel canal de la bistronomie – habituel ou historique – appartient cette adresse. Elle est gourmande et chaleureuse. Simplement «bistro».
12 rue Jean Daumas. Tel. 04 93 68 12 10. Carte 35/55 €. Fermé dimanche et lundi.