Les enfants savent se moquer, alors pourquoi les restaurateurs n’en feraient-ils pas autant ? Ouvert depuis à peine un mois à l’angle de la rue Championnet et de la place des Martyrs de la Résistance (1), Nananère démontre qu’ils ont aussi de l’humour. L’enseigne semble sortie d’une comptine de cour d’école et revendique ce mot effronté selon lequel on a bien le droit de ne pas plaire à tout le monde. Ainsi nommée, la nouvelle table d’Arnaud et Roxane Lacombe séduit un large public. On se rappelle surtout qu’ils ont tenu pendant sept ans Le P’tit Cageot, coin caché du Vieil Antibes où ils ont fidélisé une solide clientèle et ont imprimé leur marque : bons produits, main sûre, gastronomie, convivialité.
Aujourd’hui, l’histoire continue autrement. Je les ai retrouvés en pleine lumière, faisant le pari d’une restauration plus ouverte, intégrée dans l’aménagement du «nouvel Antibes», passant d’une table intimiste à un resto-bistrot armé pour les plus grands nombres. La cuisine n’est pas désinvolte pour autant, elle a même fière allure, traduite sur une carte sans longueurs, attentive au choix du produit, ainsi avec les légumes et les fruits du P’tit Jardin à Vallauris, tenu par le frère de Roxane.
J’ai aimé cette reconversion engagée à vive allure. L’oeuf mayo à l’huile de homard, pain melba, câpres frits et poutargue, pour une entrée tradi. Les casarecci aux gambas sauvages, bisque de homard et courgettes-fleurs, pâtes fringantes à l’italienne. Mieux encore ce plat mer et océan, un merlu de Saint-Jean de Luz rôti, viennoise au basilic, sauce choron et noix de cajou, parfaite cuisson et parfum du sud. Enfin un joli descrescendo en dessert avec l’abricot et pêche au sirop de tomate, mousse à la framboise et financier, préféré à la pavlova, la profiterole ou la brioche maison au rhum.
Il y avait encore de quoi hésiter dans cette distribution gourmande entre la salade grecque, tomates, concombres et feta de brebis et les macaroni aux aubergines, mozarella di buffala, pesto pistache-menthe. Ou entre le poulet fermier rôti aux morilles de Gourdon et son écrasé de pommes de terre et la côte de bœuf sauce bordelaise, échalotes confites à la moelle, frites maison… tout l’appétit de Nananère.
La cave, encore un peu courte, a du répondant avec quelques vins du grand sud, Domaine Figuière (La Londe les Maures) ou Château Lacoste en Provence, Domaine Gayda (Languedoc), vins de Loire et de Bourgogne, tandis que «La Planque du Proviseur » réserve une sélection de grands crus (Pauillac Château Batalley, Meusault Domaine Baillot, Vosne-Romanée Domaine Manière…)
Cette jeune table déborde d’énergie et dans la marge de son carnet scolaire on note les bons points : cuisine de tradition éveillée et gourmande, assiette généreuse, service attentionné et bon rapport prix-plaisir. Enfin l’atmosphère est d’une adresse contemporaine sans excès de design. Du clair, du lisible, de l’espace. Cuisines signées par ATH, cuisiniste réputé basé à Villeneuve-Loubet, murs de pierres taillées, grandes baies, ample terrasse sur la place et, plus perso encore, le coin illustré de dessins et figurines (Astérix, Gaston Lagaffe, Super Mario, Titeuf, Star Wars…). Arnaud Lacombe est passionné de BD et depuis son comptoir il a vue sur ses héros. Peu vous importe ce détail ? Alors, nananère !…
(1) Ferni est l’autre table nouvelle – et voisine – ouverte sur la place. Nouveau concept et chef de talent, à lire prochainement sur Table libre.
Restaurant Nananère, 13 rue Championnet – place des Martyrs de la Résistance, Antibes. Tel. 04 93 34 73 51. Env. 40/60 €. Ouvert tlj sf dimanche soir.
1 comment
C’est dommage qu’on ne peut plus réserver.