Il y avait Apopino au village et voici Apopino en ville. En 2017, Victoire et Jacopo Brunero ouvraient leur premier restaurant à Grimaud, place des Pénitents. Sept ans plus tard ils viennent d’ouvrir le second, rue Grimaldi à Nice. Même enseigne, même charme intimiste et en cuisine, même thématique franco-italienne.
… Ma, perché Apopino ? Parce que c’est comme çà. Décor ou saveurs, Victoire et Jacopo fonctionnent à l’émotion. Tenez, l’enseigne, le nom chante, joyeux, sonore. Apopino ! On dirait l’appel d’une mamma à son fils… « A table ! » C’est presque çà. Dans le village piémontais de Cassano Spinola, Teresa, la grand’mère de Jacopo (prononcez «Iacopo») lui avait donné ce petit nom chaque fois – le plus souvent possible – qu’il la rejoignait en cuisine. Devenu mathématicien de la finance à Milan, le piémontais se souvint des conseils de la nonna et suivit ceux de l’Ecole Ritz-Escoffier et de l’Institut Paul Bocuse.
Mais pourquoi Apopino à Nice ? Encore une histoire de coup de cœur. C’est en sortant de Chez Davia, le restaurant voisin, référence de la cuisine niçoise, que Victoire découvre « Le Bistrot marin », mis à la vente par la famille Geille, de Séjour Café et dont elle aime le décor créé au temps de la première enseigne, Mon Petit Café, dirigé par Robin Geille avec, un temps en cuisine, David Angelot, passé chez Alain Passard, Joël Robuchon et Bernard Pacaud.
J’ai retrouvé rue Grimaldi l’esprit que j’avais aimé à Grimaud. Une carte aux idées larges qui emprunte à deux pays et salue leurs terroirs, au sud de préférence. Et une cuisine d’autodidacte à laquelle Dominique Calcerano, ancien de Maximin, Pierre Gagnaire ou Jean-Jacques Jouteux, avait apporté, les premiers temps, son expérience.
Devenu urbain, Apopino conserve ce cap, fort d’un répertoire déjà rôdé. Un tartare de mozzarella di bufala, coppa et courgettes trompettes à l’italo-niçoise. Le poulpe rôti aux poivrons confits, parmi les entrées les plus vives. Un vitello tonato piémontais, bien sûr inspiré par Nonna Teresa. Le filet de loup rôti et vierge de betterave, savoureux et de juste cuisson. Les farcis de joue de bœuf confite, riso al salto aux champignons, typique de la Lombardie. La daurade en portefeuille et millefeuille de pommes de terre. Ou encore un croustillant au citron, mousse au fromage blanc et le millefeuille au chocolat gianduja et noisettes, emblématique du Piémont.
En cave, si on peut cheminer avec quelques crus italiens, pourquoi ne pas retrouver, comme à Grimaud, le rosé cuvée Sainte Anne, tout en finesse, du Château La Tour de l’Evêque, signé Régine Sumeire, grande vigneronne de Provence (son « pétale de rose » du Château Barbeyrolle bien sûr). Ou encore celui du Domaine Gavoty, à Cabasse, autre pépite du meilleur classicisme varois.
Enfin, on découvre qu’Apopino n’est pas vraiment un « restaurant italien » – si on ne retient que cette vague définition – mais une table à la gastronomie toute personnelle. Jacopo, passionné d’art culinaire, et Victoire à l’accueil adorable, écrivent ainsi une nouvelle page de leur histoire. A Grimaud ils étaient deux jeunes premiers découvrant un monde de saveurs et d’images. A Nice, où tout se joue, la scène est plus grande mais leur assurance aussi et pour Apopino, l’heure de la reconnaissance est venue dans la bienveillante rue Grimaldi.
Apopino, 11bis rue Grimaldi, Nice. Tel. 04 97 14 86 02. Ardoise du jour (entrée, plat, dessert) env. 55 €. Carte env. 60/75 €. Fermé dimanche (jusqu’à fin août).