Montauroux. « Carré d’Ange » : Carrément bon

C’est « La Petite Maison dans la prairie »… On a une âme d’enfant, quelques souvenirs, déjà lointains, du roman ou de la série télé mais il y a plus actuel. L’opération « Tous au restaurant ! »  (1 au 14 octobre), initiée par Alain Ducasse, qui (re)donne chaque année l’occasion de découvrir des tables de qualité. Parmi elles, Carré d’Ange.

Entre Var et Alpes Maritimes, Montauroux est au carrefour de ces bonnes intentions. Tous au restaurant ! – un menu acheté, le deuxième offert – donne au client le sentiment d’être le roi du pétrole et au restaurateur l’occasion de plaider son talent.

David Carré a pris l’opération très au sérieux. Son menu pour deux – 99 €, comme un remake du roman de Frédéric Beigbeder (1) – était un modèle du genre, ni trop stylé, ni démago de terroir. L’avant-garde des feuilles d’automne animait le jardin. Soleil et vent pour tous et en six plats, un parcours savoureux et cohérent malgré quelques virgules inutiles.

En entrée, comme un passage obligé, le foie gras, confit, « mi-figue, mi-raisin », fait son devoir. Un crumble d’artichauts, chantilly au lait de buflonne et truffe blanche d’été (toujours un peu anecdotique) gagne l’avantage.

Mieux encore, le loup de ligne, juste raidi, risotto soyeux et bouillon truffé, le pressé de porc pata negra, servi rosé, clouté au lard de Colonnata, enfin un entremet poire, praliné pistache, sorbet pomme-épices.

J’ai accompagné ce menu d’un « Rosé Secret » du Château des Sarrins, élégant, lumineux, sans doute l’un des plus réussis  de Provence. Une des belles cuvées de la carte, aux côtés notamment du Quintessence de Rimauresq, du Tibouren Tradition du Clos Cibonne ou du moins connu Domaine Longue Tubi.

Rendre une copie impeccable, « bien faire », marier cuisine et esprit du lieu, voilà qui est civilisé mais pourrait être ennuyeux. Entre le pavillon et son jardin-terrasse, David Carré, dont les débuts ont été bien plus hésitants, y réussit. Il écrit son histoire avec Aurélie, son épouse, et Pierre, le directeur de salle et sommelier, qui a choisi le Var après le Lido à Paris. Accueil pro et charmant, simplicité, j’aime !

Cette gastronomie est d’une créativité raisonnable et étoilable et il n’y a pas trente-six adresses varoises dans ce cas de figure. Alors, il faudra se poster dans cette maison bienveillante pour voir si Michelin est au rendez-vous. Aidons-le : Montauroux, la maison dans la plaine, à l’écart de la route qui conduit à Fayence, un saut par l’A8 depuis le littoral et voici Carré d’Ange… Vous n’êtes pas déjà à table ?

(1) « 99 francs », paru en 2004 (Ed. Grasset).