De Rome à Nice. La révélation « Epiro »

Ce nouveau restaurant italien venu de Rome brille par sa cuisine précise, gourmande, enthousiaste. Epiromania en vue !

Ce genre d’adresse, on aimerait la garder pour soi ou la kidnapper un soir pour une destination inconnue et mener l’interrogatoire. «Avoue ! Pourquoi tes fettucine comptent parmi les meilleurs à Nice et à Rome ? Et les tonnarelli des Abruzzes ! Et ces drôles de petits pains ronds, les rosette? Quel est ton secret ? Qui t’envoie ? Parle !..». Dans le quartier du port, à deux pas du quai des Corsica Ferries, avec une pizzeria pour tout voisinage, ce héros de polar qui a succédé à un restaurant alsacien s’appelle Epiro, lancé fin août par trois jeunes romains, Alessandra Viscardi en salle, Marco Mattana et Claudio Piselli en cuisine. Tandis que Rome reste fidèle à leur premier Epiro, ouvert il y a six ans, Nice fait l’actualité avec leur version du terroir – pour l’essentiel celui de Rome et du Latium – créative, «nature», sans signes extérieurs de commedia. 

Loin des tomates-mozza et italianités de pacotille, Marco envoie du vrai, du vif, du gourmand, des plats de précision, mi gouaille, mi finesse. Tomate en légère croûte de sel, petite merveille juteuse au parfum de basilic, calamar frit et brochette de caponata sauce ajo&ojo, ail et piment, tortelli de potiron et queue de bœuf braisée, comme un ragù libre et gourmand, une caille rôtie entière, relevée «alla Diavola» ou les paccheri all’amatriciana – de la ville d’Amatrice – classique du patrimoine romain. Enfin, nulle trace de tiramisu ou de panna cotta mais un sorbet pêche, crumble d’amandes, crème au chocolat blanc et verveine citronnée.

La pasta, jamais solitaire, est entourée, choyée, elle joue avec herbes, pêche du jour ou formaggio bien élevé (gran tonale, parmesan 30 mois…). Alessandra – accueil pétillant, attention et sourire – conseille une carte des vins sage et bio qui ne demande qu’à grandir. Au verre, La Torre Bianco, blanc élégant du Domaine Tiberi (Ombrie) ou le chiaretto rosé «I vini di Giovanni» au naturel soyeux.

La Côte d’Azur compte quelques tables «italiennes» à la gastronomie peut-être plus aboutie mais Epiro, décor sobre, jaune et bleu dominant, terrasse et comptoir de convivialité, apporte du sang neuf et réussit son entrée dans la bistronomie niçoise. Pas en débutant, en trattoria experte, au moral du tonnerre.