Par temps de confinements, la vente à emporter a trouvé sa place, même minoritaire. Histoire de faire quelques billets, certains assurent le minimum syndical, d’autres s’engagent avec plus de conviction. Authenticité de cuisine ou barquettes à la dérive, à chacun de choisir. En attendant la sortie du tunnel (le 20 janvier 2021 ?) voici, à La Colle-sur-Loup, Vidauban, Nice et Bandol, quatre nouvelles adresses pour patienter sur la Côte d’Azur. Haut les cœurs mais pas bas les masques !
Restaurant Alain Llorca (La Colle-sur-Loup) : click & tapas
Des tapas à emporter ou livrées à domicile ? Rien de choquant, bien au contraire, mais pas question en ce moment de tapear, d’aller de bar en bar déguster des pintxos comme par exemple en Pays Basque espagnol. Le virus, raide comme l’injustice, interdit les salles bondées et la convivialité sans distances. Alain Llorca a trouvé la parade à ce quotidien anorexique.
Ce tempérament de feu qui ne fait pas les choses à demi bouchées puise l’inspiration dans sa propre histoire. En 2003 quand il reprit le Moulin de Mougins, il dégaina un menu tapas inédit en gastronomie. Le poupeton de courgettes à la truffe de Roger Vergé restait dans la place mais cohabitait avec la nouvelle vague façon sushis de paella et coquillages de Galice, nems de rouget de roche ou sabayon froid de turron…
Celles qu’il propose aujourd’hui ont une belle gueule ibérico-méditerranéenne, livrées dans des barquettes rondes, en commandos de sept ou dix plats. C’est le propre des tapas : sortir entre copines. De l’introduction jusqu’aux desserts, signés par son frère Jean-Michel, la Llorca collection change chaque semaine.
A la niçoise
Entre autres plaisirs on picore boudin blanc, truffe noire et pomme rôtie; œuf parfait, crème de chou-fleur et caviar français; gamberoni-paella-aïoli rôti; black cod en miso; tourte de canard colvert et truffe noire; chocolat liégeois, tarte aux agrumes… Il y a même, cette fin novembre, un menu niçois dans l’esprit et les saveurs du terroir : pissaladière, barbajuans, terrine de lapin aux olives, petits farcis, stockfish, capoun de daube sauce civet et foie gras, tourte de blettes… Plus locavore, tu meurs !
Fougasse et mignardises sont du voyage, le packaging est chic, l’addition aussi, il ne manque que la vue sur Saint-Paul depuis la terrasse panoramique. Simple contretemps, ce sera un jour d’hiver ensoleillé, à la table de ce sacré aubergiste. Sans click et sans tapas.
350 route de Saint-Paul, La Colle-sur-Loup. Tel. 04 93 32 02 93. Click & collect vendredi, samedi 12h/19h, dimanche 9h/12h. Réserv. 24 h à l’avance jusqu’à 19h la veille. Menu tapas 7 plats 75 €, menu 10 plats 95 €.
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La Bastide des Magnans (Vidauban) : destination terroir
A Vidauban, Christian Boeuf et son chef Christophe Ciotta fêtent, si on peut dire, les vingt ans de La Bastide des Magnans. Une manière de valeur-refuge où il ferait bon se confiner si le temps n’était pas à la déprime restauratrice et à la bamboula des barquettes. Çà tangue dur dans toutes les cuisines mais cette adresse très varo-varoise a du caractère et ne lance aucun SOS table battue. Puisque le virus a mis les parenthèses, autant les remplir avec ce qu’elle fait le mieux, maintenir le lien avec une clientèle qui tient à son classicisme éclairé autant qu’à sa longévité.
A lire la carte on croirait qu’on déjeune encore dans le meilleur des mondes. Cette semaine, l’oeuf mollet, escargots persillade, le parmentier de joue de veau façon Rossini (foie gras et truffe) et la tarte aux pommes déstructurée ont pris le relais des saint-jacques snackées sur potiron cuit au foin, beurre de mandarine, du magret de canard, balsamique au coing et de la panna cotta au gingembre et coulis de mangue.
Un menu hebdo généreux, vraiment cuisiné, une addition de séraphin, un spécial gibier en besace, sur commande quelques plats de partage (bouillabaisse, ris de veau confits…) et en prime, le brunch du week-end… Le Covid, quel Covid ?
32 avenue du Général Gallieni. Tel. 04 94 99 43 91. Menu 29 € entrée-plat-dessert, menu gibier 55 €, brunch 24 €. Livraisons env. 10 km.
Nice @rt bistro (Nice) : à vos blanquettes !
Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Marc Laville n’inscrit pas cette devise en tête de ses ardoises mais c’est un peu ce qu’on cherche dans cette séquence «à emporter» de plus d’une adresse.
On est à Nice et c’est de la bistronomie. Pas celle, dernier cri, qui phosphore entre Vieux Nice et quartier du port. Avec son @ comme art moderne, à deux pas du musée d’art contemporain, l’adresse revendique «une cuisine bourgeoise et locale». Elle est dans la ligne de celle que Marc Laville y propose depuis sept ans après avoir bousculé le terroir avec talent à Don Camillo Créations.
En avant les recettes qui rassurent et réconfortent ! A chaque jour suffit son plat gourmand, blanquette de veau, petit salé aux lentilles, souris d’agneau confite, aïoli du vendredi…
Et sur l’ ardoise «côté traiteur», les pâtes fregola sarda comme des carbonara aux truffes, un crousti-fondant de cochon de lait, la lotte rôtie à la citronnelle, les Saint-Jacques et risotto croustillant, le pain perdu, pommes caramélisées et même un Mac «Nice Art» au foie gras et truffes annonciateur d’un menu de fêtes décontracté, promis pour fin décembre. Un spécial Laville @ Nice anti Covid.
16bis rue Delille. Tel. 04 93 91 57 98. Commandes au 06 64 20 18 79. Env. 18/25 €. Vins bio à prix caviste (200 références). Ouv. de 11h à 14 h. Fermé samedi et dimanche. Pas de livraison à domicile.
Le Shardana (Bandol) : couleur sarde
A Bandol, ce restaurant est un peu la sentinelle de la cuisine à emporter. L’enthousiasme autodidacte de Thomas Cristiani et l’accueil chaleureux de Milena, native de Sardaigne, font le succès de leur table au carrefour des cultures, entre recettes insulaires, inspiration méditerranéenne et tradition française.
On en retrouvait l’esprit pendant et après le premier confinement. Aujourd’hui, raviole de foie gras et truffe, poêlée de champignons, bouillon végétal; selle d’agneau confite et purée de topinambours; calamars de Méditerranée, farcis aux champignons, purée de haricots de Paimpol et jus de daube ; panettone au sirop d’agrumes et ganache pralinée aux amandes composent des menus de saveurs et non d’infortune. Ils ont permis de débusquer de nouveaux clients, séduits par le rapport prix-plaisir, le pain sarde, les vins de l’île à -20 % …
Le Shardana soigne le détail et joue l’alternance des terroirs (carpaccio de poulpe, agrumes, poutargue de Sardaigne ou joue confite de cochon d’Auvergne et purée de panais ?)
Thomas et Milena pensent aussi à la fin d’année et proposeront dès la mi-décembre deux menus en fête, l’un terre, l’autre mer, autour de 50 €. Quand reviendra la paix des couverts, il sera temps de goûter, à table, la seadas, raviole farcie au fromage doux, enrobée de miel et zestes de pompia (agrume de la province de Nuoro) et les culurgiones, gros raviolis farcis au pecorino. Une cuisine gourmande, moderne, vivante… sarde !
16 Rue de la République, Bandol. Tel. 04 94 32 17 79 Menu emporté 30 €, du jeudi au dimanche. Livr. à domicile.