Vence. Métin l’enchanteur

Comme il y a des nouveaux boulangers ou des nouveaux vignerons, il existe une nouvelle génération de fromagers en France. Souvent trentenaires, autodidactes, curieux du monde, maîtrisant l’anglais quand les anciens butaient sur les mots perfides (cheddar, cheshire, lancashire…), ils bousculent les artisans installés, apportent d’autres idées et méthodes et incarnent le changement. Le niçois Thomas Métin est l’un d’eux.

A Vence, rue du Marché, son magasin ouvert depuis un an est clair, gourmand, structuré, avec cave d’affinage en sous-sol, opérationnelle en novembre. Ce fromager-affineur est un ancien basketteur de haut niveau à Antibes et a la carrure de rugbyman (près de 2 m). On réfléchit à deux fois avant de discuter l’âge d’un Comté ou l’identité d’un Epoisses ! Métin, c’est l’accueil, le conseil, la poigne franche, une approche pro du métier et un parcours atypique. Il s’aguerrit quatre ans en Nouvelle-Zélande auprès d’un fromager d’Auckland qui s’approvisionne à Rungis et de retour en Europe, devient responsable du rayon fromages au fameux Harrod’s à Londres. Parler couramment l’anglais lui ouvre les portes de Laurent Dubois, Meilleur Ouvrier de France, puis de la maison Androuet à Paris. Trois ans responsable du département laitier au Lafayette Gourmet du  boulevard Hausmann, avant de l’être à celui de Cap 3000 (Saint-Laurent du Var) et de monter l’adresse de Marseille et le voila prêt pour sa propre aventure. Ses dix ans d’approche du métier (stages chez Hervé Mons à Roanne, Janier à Lyon, complicité avec Robert Bedot, l’Androuet de la Provence…) en font sans doute l’un des futurs leaders dans un domaine qui balance entre artisanat de qualité et saisonnalité de produits au lait cru et toute puissance pasteurisée et standardisée de l’industriel.

Rentabilité et passion ne vont pas toujours ensemble et Thomas Métin avance en pragmatique. Secondé par un autre passionné formé à l’école de Lyon, sa prochaine ouverture sera peut-être à Nice ou à Antibes mais pas avant d’avoir proposé aux restaurateurs et hôteliers de la région ses produits haut de gamme et son propre affinage. La «touche Métin», sa valeur ajoutée ! D’autres professionnels de talent animent ce renouveau du grand sud (1). Ils sont une vingtaine dans l’Union des Fromagers de Provence-Alpes-Côte d’Azur à  tirer le métier vers le haut. Thomas est à la manœuvre, comme Robert Bedot, qui préside les concours de producteurs (bientôt un régional), incontournable vrai-faux retraité et fédérateur de cette génération engagée.

• Marie-Alix Delmotte (La Nouvelle Crèmerie à Châteauneuf de Grasse), Eric Gayraud (365 fromages, Valbonne), Nicolas Got (Fromagerie Grosso, Toulon), Benoit Lemarié à Aix en Provence, Mallory Genillier (Le Fromager Gourmet, Cannes), Michel Pomma (Le Coin du Fromager, La Turbie), Amandine Tarpi (Le Comptoir des Fromages, Toulon), M. et Mme Nery (Fromagerie du Carré d’Or à Nice) …

                                                             Les 7 coups de cœur de Thomas

Dans la gamme de 150 à 200 références qu’il propose à Vence, voici ses sept coups de cœur du moment.

Laruns de brebis

Entre Béarn et Pays Basque, un brebis fermier au lait cru, quintessence du lait d’un seul troupeau et d’un affinage à froid très poussé.

Venaco

Brebis au lait corse fermier, frotté à l’eau et au sel pour exalter ses arômes. Artisanal, rare, complexe.

Beaufort Chalet d’Alpage

Confectionné dans des chalets d’alpage à plus de 1500 m, de juin à septembre. Pâte beurrée, ronde mais fleurie. Finesse et longueur en bouche. Parfait avec un vin de Savoie, mondeuse (rouge) ou apremont (blanc).

Fourme de Montbrison

Plus délicate que la fourme d’Ambert. Pâte onctueuse, couleur ivoire, richesse du lait au palais, notes bleues moins marquées que celle d’Ambert.

Brie de Melun

Le plus ancien fromage de la Brie, étonnant d’onctuosité, saveurs de champignon et herbe fraîche. En voie de raréfaction.

Soumaintrain IGP

Un cousin de l’Epoisses, pâte souple, belle expression du terroir bourguignon.

Etivaz

Fromage suisse du canton de Vaud, affiné 12 à 18 mois. Goût plus intense et salé qu’un Beaufort. Le caillé est cuit au feu de bois dans une cuve en cuivre à l’ancienne.