Le breton Didier Corlou est une star au Vietnam. A Hanoï, en cinq adresses, il a concilié cuisine de rue, gastronomie et tradition. A Cannes, il a confié à son fils Michel Mihn Corlou «Madame Hiên», table simple et sincère qui en dit long sur la diversité de la cuisine vietnamienne. A découvrir sans tarder.
Cannes n’est certes pas Hanoï mais avec l’ouverture de «Madame Hiên» il existe désormais un peu de Hanoï dans le cœur de Cannes. Si, en France, un épais brouillard plonge souvent les cuisines d’Asie dans un même wok d’ignorance et de confusion («si on allait au restaurant chinois … si on mangeait thaï ?»…) cette adresse remet les saveurs en bon ordre, séduit par son authenticité, la légèreté de ses plats et l’empathie de Michel Mihn Corlou à qui Didier, son père, vient de confier cette ambassade culinaire.
Didier Corlou est sans doute peu connu sur la Côte d’Azur mais ce breton a acquis une solide réputation au Vietnam. Il y a quelques années, j’ai pu apprécier l’étendue de son talent à La Verticale, sa table gastronomique de l’ancien quartier français d’Hanoï, installée au premier étage d’une maison années trente où il délivrait une gastronomie délicate qu’on aurait emportée sans tarder dans nos pays lointains.
Le secret de ce natif d’Hennebont ? Son ouverture au monde et une curiosité sans frontières. Paris, Sénégal, Zaïre, Côte d’Ivoire où il a travaillé curcuma, piment et papaye verte, Bora-Bora, où nait sa «cuisine-soleil», Comores (la vanille), Moorea, Martinique, Malaisie, Thaïlande, Cambodge… puis Hanoï en 1990 où il devient chef au Sofitel Métropole et restera pendant quatorze ans avant d’ouvrir son premier restaurant en 2007 et de tenir avec Mai, son épouse vietnamienne, cinq adresses… avant l’arrêt des années Covid.
Au fil de ses voyages, il a appris la cuisine de rue, l’art de marier poissons et légumes et une cuisine traditionnelle vietnamienne à base d’herbes et d’épices qu’il recrée et magnifie chaque jour. Aujourd’hui, si une ouverture est envisagée à Paris, c’est à Cannes, à deux pas du marché Gambetta, que Madame Hiên s’exporte avec succès. Michel Mihn Corlou y cultive esprit de famille (l’enseigne rend hommage à son arrière-grand mère), savoir culinaire, créativité, accueil enthousiaste.
L’adresse n’est pas un oiseau rare mais une invitation sérieuse à découvrir quelques plats du nord Vietnam traités d’une main sûre et à trouver le point d’équilibre entre tradition et modernité. Les Rouleaux de printemps, mangue, crevette et feuille de shiso, précèdent les nems traditionnels d’Hà Nôi, enveloppés de papier de riz avec farce de porc, vermicelles, champignons noirs séchés et herbes. Et puis il y a le pho, soupe originaire du Nord, bouillon national aux nouilles de riz, herbes avec foie gras poché, gingembre et nước mắm,cet indispensable releveur de goût, lamelles de bœuf, coriandre, anis ou clous de girofle. Le bun cha, soupe de nouilles avec, servi à part, un bouillon aigre-doux, sauce de poisson. Le banh cuon(raviolis vietnamiens), le filet de bœuf grillé à la citronnelle, jus au gingembre… annoncent eux aussi une fête légère.
Madame Hiên est enfin un univers d’épices : citronnelle, gingembre, cannelle, poivre rouge Phu Quoc… La sélection de Michel Mihn Corlou fait écho aux Épices Corlou de sa boutique d’Hanoï : curry d’Halong (curcuma, gingembre, cannelle, anis étoilé, coriandre, piment rouge), Hanoï 5 épices (cannelle, anis étoilé, cardamome, coriandre, poivre noir), sel de pagode, cannelle cassia… Autant de saveurs, désirables et sans violence.
Mme Hiên, 14 rue Hélène Vagliano, Cannes. Tel. 04 93 99 25 15.
Set du midi 14 €. Carte env. 32/48 €. Épices Corlou (pot de 35g : 8,50€). Ouvert tlj midi et soir.
www.madamehiencannes.com