Nicolas Decherchi a du style. A deux et même à une étoile, sa cuisine «tradition-création» séduit, à Mougins comme à Prague. Simple question d’équilibre…
A Mougins, qui n’est pas un village gourmand comme les autres, Paloma, table née en 2013, ne ressemble à aucune autre. Décor noir et blanc, chic baroque avec lustre de cristal Swarovski, banquettes, soiries, fumoir, service engants blancs… c’est un salon de courtoisie. A peine arrivé, Nicolas Decherchi obtint une étoile pour sa cuisine «française-contemporaine» entre cossu de la tradition et audace de la création, la deuxième vint en 2016 et a été retirée cette année. Après l’ascension de ce chef formé à plusieurs sources (Bruno de Lorgues, Georges Blanc, Bruno Oger, Eric Fréchon, Cyril Lignac…), voici le temps du rebond et de la réflexion.
Avant le verdict du guide rouge, fin janvier, un dîner ne laissait rien paraître. On retrouvait son habileté à trousser une brunoise ou une cuisson meunière, un réel talent porté sur l’enluminure, non sur l’épure.
L’huître Gillardeau, grillée, velouté de cresson et voile de vin jaune, brunoise de calamars et piquillos, les calamars encore, garnis d’un crémeux à l’artichaut de crabe-de-lune (un tourteau, quoi), le filet de saint-pierre au chorizo «bellota», la pomme de ris de veau glacée au jus de blanquette, légumes cuits au bouillon… la technique séduit, jusqu’au délicat millefeuille aux épices, crémeux à la vanille fumée, et une crêpe à la châtaigne et jus de mandarine, flambée au bourbon, dans les règles de l’art.
Dirigé par Patrice Dubois, Paloma est classieux et festif. Et même si le style diffère, sa cuisine fait penser à ces lignes de Roger Vergé dans «Légumes, recettes de mon Moulin» (1997): «La renommée de la cuisine française tient pour une large part à la variété et à la qualité des sauces destinées à mettre en valeur viandes, crustacés, poissons… et légumes».
Alors, avant de casser votre tirelire, commencez par l’épatant menu déjeuner (59 €), même esprit, même décor. Dans ce restaurant qui fait briller Mougins, Nicolas Decherchi va devoir régler fin la balance entre Paloma I (Mougins) et Paloma II (Prague). Deux tables, une marque… Simple question d’équilibre.