Dans la discrète rue Massenet, Franchin se tient loin des tables qui médiatisent à toute vapeur, entre le port et la place Garibaldi. Esprit et bonne humeur de bistrot-brasserie parisien, il n’est pas fiché dans les rangs de la bistronomie niçoise mais qu’importe car l’histoire de ce restaurant créé en 1905 par Mr Franchin et réactualisé depuis huit ans par Antoine Gandon, vaut mieux que bien des succès éphémères
Formé auprès de Joël Robuchon, Yannick Alléno et Alain Ducasse, fils de Maryan Gandon, ex chef exécutif du Fouquet’s Barrière à Cannes, qui régale à deux pas d’ici (1), ce chef de talent revendique à bon droit l’expression d’artisan restaurateur.
Sa carte d’hiver le confirme, gourmande dès la burrata crémeuse qu’on attendait passe-partout et qui s’encanaille avec un riz rouge de Camargue et voyage avec kiwi, grenade, coriandre, kumquat, vinaigrette miel citron et piment. C’est une entrée surprise, bienvenue au côté des indétrônables escargots de Bourgogne XXL en persillade et de la terrine collector «Grand-Père André 1962», mirabelle au vinaigre de miel.
Alors, cap sur la terrine de foie gras, artichaut barigoule et brioche au miel, avant la tresse de filet de loup, plat stylé et signature, mousseline de chou-fleur, choux croquants et gnocchis croustillants qu’ensauvage une sauce curry. Puis on découvre un inattendu moyen oriental, des keftas de bœuf et agneau, taboulé vert, baba ghanousch (caviar d’aubergines), sauce yaourt à la coriandre, et on retourne au bercail avec les crêpes Suzette flambées, jus à l’orange, glace au Grand Marnier.
Antoine Gandon respecte la tradition, la bouscule parfois mais rassure toujours une clientèle d’habitués qui ne lui dit pas «c’était mieux avant». J’aime sa maîtrise et son jeu des contrastes, la clarté du dressage, l’accueil épatant d’Orlane, à qui rien n’échappe.
Franchin soigne la cuisine et le décor : salle au style Art Déco, tables nappées, banquettes et miroirs, entrée vitrée et ferronneries, terrasse protectrice entourée de verdure… On s’éterniserait volontiers dans cette brasserie-refuge qui vous confie les clés de son bien-être : un bonheur simple, une complicité gourmande, une tenue, une atmosphère… C’est l’effet Gandon.
(1) Zorzetto, 3 rue Dalpozzo.
10 rue Massenet (piétonne). Tel. 04 93 87 15 74. Carte env. 45/55 €. Fermé lundi, mardi.