Ah, le fameux «Marais niçois» ! Autrefois on trouvait dans le quartier des ampoules électriques, de la droguerie et du ressemelage. La vie d’avant, il y a vingt ans, quand Sapore jouait les pionniers de la food avec ses épatantes tapas méditerranéennes, place du Pin… Aujourd’hui, aux premiers mètres de la rue Bonaparte, depuis la place Garibaldi, on ne compte plus les restaurants. Trop de terrasses, trop de carpaccios, trop de ceviches… et aucune ampoule à vendre. Autre temps.
Mais voici un échappé du peloton, longue devanture ponctuée de mini terrasses façon alcoves. C’est Pinpin, comme la place du Pin, sa voisine. Au début de la rue Martin Seytour, elle est la «table d’à côté», préservée de l’embouteillage des terrasses qui ont poussé rue Bonaparte comme champignons après la bistronomie. A côté ne veut pas dire hors sujet ! Pinpin a sa personnalité, décor sobre et tons pastel, deux salles claires et intimistes encerclant un grand comptoir au plateau de marbre…
Axel Blot de la Fuente et Renaud Chaumien l’ont ouverte il y a deux ans, quand le Covid baissait d’un ton mais n’avait pas encore pris le large. Axel, passé au Cosmo à Villefranche-sur-Mer, au Grange Hotel dans la City à Londres et pendant quatorze ans en salle à La Merenda. Renaud, au même parcours éclectique, à l’Indyana (Nice) puis à l’Hôtel du Cap Eden Roc (Cap d’Antibes), sans oublier La Voile Bleue tenue par sa famille à Villefranche-sur-Mer. Les voici à l’épreuve de la restauration d’aujourd’hui, imaginative, impatiente et fragile. Rue Martin Seytour, ce duo n’impose aucune thématique, fut-elle locale et a confié au niçois Fabien Benhamou, formé chez Anne-Sophie Pic, le soin de réinterpréter les classiques et d’ouvrir sur une plaisante cuisine du monde.
Ouverture est bien le mot. Assiettes généreuses, épices sans violence, vivacité, douceur d’un labneh libanais, impeccable œuf mayo, persil et rémoulade de céleri au wasabi, avant le crudo de thon rouge, mangue, kumquat, piment et cébettes ou un confortable paleron de bœuf confit, sauce meurette (lard fumé, vin rouge, oignons, champignons)… Fabien ne s’interdit rien, répond aux demandes de l’époque – vegan, locavore, végétarien, sans gluten.. – et suit sa propre inspiration.
Quelques plats sont devenus «signature» comme le chou-také (chou rouge, carottes, champignons shiitake, enoki, sésame, soja et gingembre), ou le brocoli frit, chapelure japonaise panko et mayonnaise aux épices mexicaines. Les desserts sont dans la note, crêpes Suzette, pomme au four (crumble quatre épices, crème d’Isigny) ou un «pinpin perdu» sage et gourmand, avec fruits, amandes, caramel et glace vanille.
Enfin il y a à boire autant qu’à manger à cette table où on boit plus malin que dans d’autres tavernes voisines. Pinpin s’est tout simplement donné la peine de chercher et de servir à prix retenus, vins d’auteurs, bio ou pas, et cuvées buissonnières. «Il fait soif» de Maxime-François Laurent, côtes du rhône rouge, Domaine Chaume Arnaud en Vinsobres, Cornas de Mathieu Barret, Sylvain Pataille (Bourgogne 100% pinot noir), Barouillet (Bergerac blanc), Nicolas Mariotti Bindi (Oletta Corse 100 % vermentino)… L’aventure continue pour cette table décontractée et accueillante, adresse de midi autant que du soir, cuisine à panache et atmosphère de chic bistro. Dans le Marais niçois, pensez à Pinpin, la table libre de la rue Martin Seytour !
Pinpin, 2 rue Martin Seytour, Nice. Tel. 09 72 86 57 47. Formule déjeuner 19 €. Formule 23 € à déj. en sem. Carte env. 28/38 €. Fermé dimanche et lundi. .Site : pin-pin.fr
