Quoi de neuf chez Bruno ?… Bruno. Ici vit la truffe, à bâbord comme à tribord et dans tous ses états, melanosporum, brumale, aestivum, uncinatum… Mais nul besoin d’être latiniste pour s’attabler !
Cela fait plus de trente ans que Bruno a réglé cuisine, décor, mise en scène et thématique, résumée par son plat-culte, qu’il n’est pas question de chipoter, la pomme de terre “tout simplement” cuite au four, accompagnée de crème et râpée de truffes…
Aujourd’hui, rien ne change et tout change. Benjamin, le fils, a repris les fourneaux de Clément, le père. Le créateur-conteur-acteur-scénariste du hameau truffier qu’il a imaginé et enluminé est toujours à la manoeuvre et l’écho de ses chuchotements, façon ténor, monte depuis la “salle d’hôtes” en sous-sol. Mais dans la cuisine aux carreaux de Salernes, Benjamin, formé chez Ducasse et qui ouvrit “Le Diamant Noir” à Nice avant de prendre le chemin de Lorgues, est aux commandes.
Avec Hugo Carmona, son second, il retouche le répertoire sans dévier de la ligne ni “tuer le père”… Les caillettes provençales de Gérard Puigdellivol sont à poste, le suprême de chapon fermier de Pierre Duplantier, rôti, avec purée de châtaigne truffée, est de la fête, canetons et poulardes sont du même éleveur béarnais et la simplicité culinaire que Samuel, le frère de Benjamin, défend en salle est suivie à la lettre.
Benjamin allège parfois cette cuisine au grand coeur qui a fait la réputation de la maison, par exemple avec le Gargouillou, inspiré du plat créé par Michel Bras, en 1980 à sa grande table d’Aubrac. On aime sa version, modeste et juste, aux légumes croquants et… truffe, soulignée d’un trait d’huile d’olive au fruité vert (Domaine des Rabelles à Villecroze). Ou encore les délicats agnolotti aux trois viandes – veau-volaille-cochon – avec la truffe blanche, et l’oeuf poché et raschera, fromage de vache de la région de Cuneo, accordés avec la cuvée Simone du Clos d’Alari (Saint-Antonin-du-Var) que propose Bastien, le chef-sommelier.
Damien, ex pâtissier de Nicolas Sale, est dans le même esprit maison avec la “plancha” de desserts gourmands, de l’île flottante truffée à la crème brûlée au parfum de truffe ou au baba à la mandarine.
En marchant sur des oeufs – ou des truffes – on écrit alors “transmission” et on s’amuse du jeu complice entre père et fils autour de ce sujet brûlant : quel chemin prendre pour perpétuer le succès du convivial Château de Moulinsart de la rabasse ?
Pour l’instant, on n’imagine pas Bruno en pantoufles ou muet. Avec le fidèle Dominique Saugnac, il fourbit conseils et projets – son restaurant à Saint-Pétersbourg, la construction de la chapelle du Plan, qu’il voit déjà consacrée sur une restanque voisine – et “veille à tout”. Benjamin, qui vient de sortir son premier beau livre (*), affirme sa cuisine-plaisir d’entre Provence et Piémont, chic et terrienne à la fois, déclinée entre terrasse-véranda et salles aux boiseries.
Ainsi, rien ne change et tout change à la Campagne Mariette, sur la route de Lorgues où Bruno, plus qu’un restaurant de la truffe, demeure un lieu rassembleur d’art, d’images et de cuisine, somptueux et provincial. Comme un théâtre en famille.
(*) “Les Balades truffées de Benjamin Bruno”, Ed. Campanile, 195 pages, 39 €).
Infos pratiques
- Adresse : 2250 route des Arcs, Le plan Campagne Mariette, 83510 Lorgues
- Tél : 04 94 85 93 93
- Site : www.restaurantbruno.com
- Menu : Menus 78, 125, 175 et 195 €
- Carte : Env. 120/180 €
- Chambre : 6 chambres 160/320 €
- Fermeture : Ouv. tlj de mi-juin à mi-sept. Fermé dim. soir et lundi HS
1 comment
Un restaurant tres genereux, ici on mange bien et beaucoup. Une cuisine classique, tres bien execute’ . Et beaucoup de gentilesse et d’accueil.