Golfe-Juan. « La Cabane »: l’effet Thomas Colinet

Il y a comme cela des restaurants qui n’ont rien demandé à personne. Ni l’emplacement, ni l’enseigne et le décor, encore moins l’accueil et le style de cuisine. Ils se débrouillent seuls et font fructifier, seuls, leur capital clientèle. C’est le cas de La Cabane à Golfe-Juan.

Sans allumer le feu entre adresses concurrentes, c’est la meilleure « petite table » sur le port Camille Rayon, à Golfe-Juan. S’il existait un concours de la plus belle vitrine ou de la plus chic terrasse, elle serait peut-être dans les choux mais pour l’équilibre entre cuisine, atmosphère et sympathie, elle a des arguments avec salle en pleine lumière, décorée façon club de voile, larges baies, murs boisés et terrasse-jardin, protégée en hiver.

L’ami Bruno Gensdarme, qui a cédé son excellente Table du Chef à Cannes, y a ses habitudes et m’a rafraîchi la mémoire d’un « va à La Cabane ! » sans appel. Elle s’était emmêlé les neurones mais s’est ressaisie, un midi, dès le premier plat puis en picorant dans celui choisi par ce cuisinier expert. Un aïoli modèle du genre, monté à la pomme de terre, cabillaud nacré avec courgettes, navet, fenouil, chou romanesco, pois gourmands…

L’émincé de poulpe mariné au citron vert et salade d’herbes fraîches avait donné le ton : saveur, parfums, dressage, généreux de l’assiette. Une cuisine de soleil sans besoin d’explication de texte, avec ses classiques (foie gras mi-cuit, gnocchis maison, avec aubergine confite, onglet-échalote- vin rouge et l’écrasé de pomme de terre à la ciboulette…), le café gourmand, une jolie version de pana cotta. Et surtout le dernier péché, aussitôt avoué, aussitôt dégusté : le spécial Cacahuète, avec ses petites caramélisées, glace à la cacahuète, chantilly et caramel au beurre salé. A confesse, reconnaître avoir pris du plaisir avec cette gourmandise, c’est sûr, on prendrait cher !

Ainsi remise à niveau, ma mémoire remontait le cours de l’histoire. Le chef-patron, Thomas Colinet ? Bien sûr ! Cet ardennais beau gosse a fait ses griffes au début des années 2000 dans le Vieil Antibes. C’était au Comptoir de la Tourraque, bistrot-resto du soir au charme rustique avec salon-fumoir et table d’hôtes. Convivialité, art du simple, produits choisis… un succès, déjà.

Mêmes vertus à La Cabane, qui fait le plein de travailleurs à midi, comme au dîner avec clientèle chic et relax, cuisine à la minute qui hausse le ton, service sympa et vaillant. Inutile d’employer la torture pour faire avouer les habitués : La Cabane est vertueuse (le menu déjeuner, 24 €), les soirs d’été c’est fête et ce bistrot-resto à la réussite tranquille ignore les mortes saisons. L’effet Thomas Colinet !