Malgré un coup de blues pour certains en début d’année, le nombre d’engagés dans cette restauration de secours reste stable. Peu de défaillances, pas de nouvelles recrues, de vraies réussites et une épreuve qui n’en finit pas… A la Table du marché, Le Panier (Nice), La Salle à Manger (Flayosc), voici trois adresses de la Côte d’Azur glanées sur cette (trop) longue route.
A la Table du marché (Nice)
On cherche toujours la petite table de référence, «bonne, pas chère, sans prétention». Le fameux mouton à cinq pattes. Alors que la restauration vit ses pires moments, cette adresse reste éligible au titre tant convoité. C’est une histoire de solitude. En cuisine. Celle du tourangeau Florent Barbereau, voisin et bon client du marché de la Libération. Quelle que soit la météo de la vente à emporter, il y trouve de quoi régaler un fan club qui ne l’abandonne jamais. A Nice, ce vaillant et ce modeste fut le premier, il y a un an, à anticiper et à maîtriser l’exercice.
Sa carte change chaque jour, pas les prix, imperturbables, ni l’interprétation du produit, savoureuse, familiale. Les dernières nouvelles du front le confirment avec la focaccia grillée au saumon et oignons confits, le pavé d’épaule d’agneau – cuisson basse – croustillant de pommes de terre au Saint-Nectaire et légumes braisés, la cuisse de poulet Miéral rôtie, pulpe de patate douce, sucrine et pieds de mouton sautés à l’huile de noix ou la poire pochée au vin rouge et épices, crème légère vanillée, figues séchées…
Pas de chic bistronomie en vue mais une cuisine simple et touchante de vérité. Signe particulier, Florent Barbereau a travaillé notamment avec Edouard Loubet puis avec Jean Sulpice (époque Val Thorens). Moralité: de la gastronomie d’altitude comme introduction à la cuisine du marché…
24 Bd Joseph Garnier. Tel. 04 93 78 43 78. Ouvert à midi du lundi au vendredi. Entrées 6 à 9 €, plats 10/15€, desserts 4/6 €, formule plat-dessert-boisson 15 €.
Le Panier (Nice)
Inutile d’enrôler un spécialiste des parcs et forêts pour valider l’information : l’érable du Canada n’est pas un arbre de la Côte d’Azur, il est simplement en mission rue Barillerie, en retrait du cours Saleya, chez Aurélien Martin et Marie Lacoue. Arrivés l’an dernier du Québec et repreneurs du Panier de Gaël Passigli, aujourd’hui à Z restaurant Tapas, ils lui dédient un menu de belle curiosité pour les deux prochains week-ends. Un hommage au printemps québécois, saison de la récolte d’eau de l’érable à sucre pour la fabrication du fameux sirop.
Une rencontre aux accords gourmands à emporter tels un tataki de cerf, vinaigrette bière-érable, condiment radis, une entrée de saumon gravlax mariné à l’érable, le duo de porc laqué au soja et érable, purée de patate douce, pomme de terre nouvelle, et un «pouding-chômeur», crémeux d’érable-ananas rôti, dessert populaire et sucré qui date de la crise économique de 1929. Aurélien et Marie reprendront ensuite le cours de leurs menus fin de semaine à 39 €.
Pour avoir goûté l’an dernier un vitello tonato néo piémontais revisité, thon et crème de parmesan et la tarte au citron «tête à l’envers», crémeux et meringue par dessus un sorbet pêche-basilic, cumbawa râpé, je conseille une visite sans retard au Panier dès le retour à une vie normale. En attendant, les «québécois» du Vieux Nice préparent avec Gaël Passigli un spécial Pâques «cause commune» qu’il ne faudra surtout pas laisser s’envoler.
5 rue Barillerie. Tel. 04 89 97 14 37. lepaniercontact@gmail.com
Menu érable 39 € pour les 20-21 et 27-28 mars. Menu de Pâques 3 et 4 avril. Livraison à dom. sur Nice.
La Salle à Manger (Flayosc)
Ils résistent, Liesbeth et Ronald Abbink… Avant le temps des confinements, ils ne pensaient pas devoir se «réinventer» pour cause de pandémie dans la Provence qu’ils avaient découverte vingt ans plus tôt en quittant la Hollande pour la lumière du haut Var. Mais ces autodidactes devenus aubergistes n’ont pas hésité longtemps et ont rejoint les résistants de la vente à emporter, comme Davy et Emilie Jobard, propriétaires du «Nid», plus haut dans la grand’rue. Ils le font à leur façon, en «anciens» du village qui ont un lien à préserver avec leur clientèle, française et étrangère. Dans cette période difficile, on retrouve la cuisine tradi de Liesbeth, en mode résistance. Elle concilie le classique et le moderne en faisant parfois quelques entorses au terroir. Si vous avez aimé sa terrine de foie gras farci aux figues, les pâtes au sanglier, sauce truffée, ou le bavarois à l’orange et «crêpe Liesbeth», l’un de ses plats signature, vous emporterez, de même générosité et de même facture, une terrine de jambon cuit, pommes de terre et asperges vertes, le cabillaud norvégien en filet prêt à cuire, croûte d’amandes, patates douces et chanterelles ou le filet mignon de porc façon Wellington, petits légumes et pommes de terre à l’estragon. C’est la Provence aux petits soins, gourmande et lisible, version Liesbeth. Menu 27,50 €.
9 place de la République . Tel. 04 94 84 66 04.