Tout à leur métier ou au bord de la rupture, courageux, piégés, fragilisés, les chefs et les restaurateurs de la vente à emporter approchent pour la plupart de six mois de cet engagement. Parenthèse, lien ou fardeau, pour tous c’est une trop longue histoire.
Nice Côté Sud
Pour la connaître de longue date, je tiens cette adresse pour l’une des plus attachantes de la ville. Question de convivialité et de qualité des produits, à commencer par le pain et le vin, bibliquement essentiels.
Située dans une rue courte et tranquille, la table de Luc Jaffrès est unique en son genre. Sur la colline de Cimiez, dans un quartier bourgeois qui l’héberge depuis près de vingt ans et lui assure une clientèle de bon voisinage, elle vit peut-être cachée mais chaleureuse et sans façons, avec terrasse et jardin. Elle a tout compris !
J’y ai goûté la salade de courgettes de «Pépé Jacquot», un rôti d’agneau aux herbes sage comme un pâturage et un gâteau aux figues à la douceur provençale. Le virus n’a pas emporté ces souvenirs et on retrouve l’esprit originel sur une carte courte de bel appétit : saucisse de Morteau aux lentilles, quiche-salade du jour, terrine de sanglier, joue de bœuf à l’orange, paupiettes de veau, poitrine de porc farcie, fromages de vache au lait cru entier de Flore et Nicolas (La Ferme des Gastres à Annot, tel. 06 71 01 05 03), gâteau au chocolat…
La maison vit bio, des œufs et légumes (Ferme Lavancia à Puget-Théniers) aux vins à prix caviste (Mâconnais d’Emmanuel Guillot, Brouilly de Jean-Claude Lapalu, Régnié de Julien Sunier…) et peut être fière de ses pains au levain naturel et farine de blés anciens… signés Luc Jaffrès. Moralité, montez à Cimiez et cap sur Côté Sud…
2 rue du Pr Maurice Sureau. Commandes par tel. 04 93 01 36 40 ou par mail, resto.cotesud@free.fr Ouv. mercr. et vendr. seulement. Sur réservation. Env. 25/32 €.
Flayosc Le Cigalon
Flayosc compte quelques restaurateurs parmi les plus engagés dans la vente à emporter. A l’écart du centre, Laurence et Hervé Gély ont mis à profit les confinements pour mener une révolution de façades. Murs ocre et volets verts, l’esprit est au printemps et l’accueil du jardin sera précieux quand s’ouvriront, partout, les portes du pénitencier. Ils défendent leur artisanat culinaire avec la sagesse des auvergnats (Saint-Flour). Hervé Gély et son parcours éloquent, notamment à La Pyramide (Vienne), à «L’Oasis» avec Stéphane Raimbault, le «Relais Bernard Loiseau» à Saulieu, le «Saint-Paul» à Saint-Paul de Vence…
Aucune tempête sous un crâne quand il lui fallut passer au click & collect villageois. Il soigne le détail et le menu de Pâques illustrait son discours de la méthode. Grosses asperges vertes, artichaut et coques, vinaigrette à l’oeuf et estragon, agneau en crépinette longuement confit et aromatisé au citron, fraises en gelée de verveine et safran… Vous voilà prévenus : au prochain rendez-vous, pour la Fête des Mères, peut-être avant, il faudra compter avec Le Cigalon.
5 Bd du Grand Chemin. Tel. 04 94 68 69 65. Menu 37 €.
Vence Les Agapes
Vite, un détour par les réseaux sociaux… Jean-Philippe Douroux y consigne ses inspirations «click and eat» de la semaine et dessine entrées, plats et desserts «exposés» sur un cahier à spirales. On dirait du William Sheller. Joli trait de crayon, esprit art et essai, envie de tout croquer sur «Insta».
A deux pas de la petite rue du Marché et ses précieux artisans (Boucherie Fleuriel, les légumes de Stéphane à Vence Eco, la Fromagerie Métin…), il tient depuis douze ans l’une des bonnes tables du moyen pays et veille sur son restaurant comme aux beaux jours d’avant la pandémie.
L’actuel minestrone de légumes au vinaigre de tomates, basilic frais et mousse de rouget, le demi magret de canard, mousse de patate douce aux fruits de la passion, un hachis parmentier végétarien gratiné au fromage de brebis et la fine tarte aux pommes, mousse glacée à la vanille sont d’une cuisine précise aux prix bien gardés. Et à la reprise, cet été, on retrouvera la terrasse pour goûter les dessins et les bons plats de Jean-Philippe Douroux.
4 Place Clemenceau, tel. 04 93 58 50 64. Commandes au 06 79 81 08 26, retrait au restaurant samedi entre 9h30 et 13h. Env. 30/35 €.
Nice Chez Palmyre
Peut-être existe-t-il encore un terrien qui ignore l’existence de ce bouchon du Vieux Nice créé en 1926 par Palmyre Moni, mamma venue de Toscane. Tant pis pour cet égaré. Vincent Verneveaux, ancien de Jacques Maximin et Guy Savoy, le conduit avec succès depuis douze ans, suivi par un fan club international ému dès la première heure par une carte au choix de quatre entrées, quatre plats, quatre desserts… pour 20 €. La vente à emporter n’a pas compromis sa cuisine familiale : tartine de chèvre au miel, velouté de courgettes au pistou, dos de cabillaud à la niçoise, osso bucco, confit de joue de bœuf, île flottante, fromage blanc et compote de mûres, riz au lait aux abricots… D’autant que Vincent Verneveaux cultive la rareté. Le dernier menu (30 €) a été signalé pour la Saint Valentin et les prochains sont attendus en mai, dont un spécial Fête des Mères au même prix. Palmyre c’est l’art du simple avec tartine de chèvre au miel, velouté de courgettes au pistou, dos de cabillaud à la niçoise, confit de joue de bœuf, île flottante, fromage blanc et compote de mûres… Une affiche de restaurant populaire, un b-a ba gourmand et pas de clap de faim.
5 rue Droite, tel. 04 93 85 72 32.